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CHEMIN

  • Photo du rédacteur: Melanie Blaser
    Melanie Blaser
  • il y a 4 jours
  • 4 min de lecture

Aujourd’hui je suis allée en forêt. J’ai parqué ma grosse voiture. J’ai mis mes grosses chaussures. Et j’ai suivi le chemin. Mais au lieu de partir à droite, comme je l’avais toujours fait avec mon ami, je suis partie à gauche pour chercher mon propre chemin.

forêt

Le sentier est caillouteux, herbeux, large. Les promeneurs, les chiens, les vélos, les chevaux et les poussettes s’y promènent. Après quelques minutes, je tournai à droite sur un chemin plus raide et plus étroit pour aller au bord de la rivière. Je traversai un petit pont de bois et je posai mon sac. À cet endroit-là, la rivière fait une boucle et un bras de rivière continue sa course en aval. Dans la boucle, il y a un îlot avec deux bancs, un foyer éteint et une grosse racine d’arbre sur laquelle je m'assis. Je bus mon café et mangeai ma tartine de pain de graines avec de la confiture de framboises. Je reposai mon corps, calmai mon cerveau en ébullition permanente, consolai mon âme souffrante, soignai mon cœur douloureux. J’écoutai le bruit de l’eau, qui m'apaisa. Je regardai les feuilles tomber, tournoyer, tout doucement, une par une, comme des gros flocons de neige et se poser tranquillement, sur l’eau, sur un tapis de feuilles ou de mousse, sur un tronc coupé. Au hasard ?


Je repartis et j’eus envie de passer dans la forêt. Mais il n’y avait pas de chemin. Alors, comme quand j’étais petite, je m'enfonçai entre les arbres.


J’écartai les branches entrelacées d’arbustes feuillus qui me dirent :

« Qu’est-ce que tu fais là ? »

« Je m’aventure »


Un gros tronc coupé, auquel il manquait une partie de son écorce, me demanda :

« Pourquoi passes-tu par ici ? »

« Je traverse la forêt »


Je saisis une branche morte pour l’écarter et elle se cassa, je lui demandai pardon, mais elle ne répondit pas.


Je dus traverser la rivière. Elle me laissa passer en levant les yeux au ciel. Je slalomai à travers les arbres, certains me laissèrent passer, d’autres me bloquèrent la route. Des ronces essayèrent de me retenir :

« Où vas-tu ? Il n’y a pas de chemin ici ».

Je saisis délicatement une feuille, pour ne pas me piquer et repousser la ronce, et je répondis :

« Je cherche mon propre chemin »

« Tu n’as pas ton propre chemin, tu dois suivre le chemin tracé pour tous les promeneurs, les chiens, les vélos, les chevaux et les poussettes. »


Mais je ne l'écoutai pas et persévérai, passant entre des petits sapins aux épines douces et tendres, puis à travers les branches sans feuilles de petits arbres. Je poussai l’une d’elle et elle me piqua dans l'œil. Je criai et une larme coula. Un beau tapis de mousse adoucit mon chemin. Un tronc moussu me demanda pourquoi je le cambai.

« Je cherche mon chemin, je suis perdue. »


J’arrivai alors à un pâturage dans lequel des vaches broutaient. J’avais entendu leurs cloches depuis les bois. Deux d’entre elles me regardèrent d’un air interrogateur. La première se reposait, posée sur son ventre avec ses pattes repliées sous elle. La deuxième ruminait. Je longeai alors les fils barbelés qui séparaient l’herbe de la forêt et je retrouvai le chemin. Je défis ma tresse et retirai toutes les petites branches qui s’étaient accrochées à mes cheveux. Elles protestèrent :

« Que fais-tu ? Pourquoi nous laisses-tu ici ? »

« Je n’ai pas besoin de vous, vous m’encombrez, je veux me débarrasser de vous. »


Bientôt, le chemin s’arrêta brusquement. Je lui demandai pourquoi, il m’indiqua la forêt. Les épicéas et les frênes me regardèrent de haut. J’entendis un bruit d’ailes, mais je ne pus voir l’oiseau. Un bouquet de trèfles sur un tronc moussu m’observa. Deux champignons blancs m’ignorèrent. Tous ricanaient sous cape.

trèfle

J’arrivai finalement essoufflée sur la route et me mis à la longer et à rire en pensant à ces promeneurs que je voyais marcher le long des routes en me demandant pourquoi ils ne se baladaient pas dans les bois ou sur les petits chemins dans les champs.


Les orties et le plantain se moquèrent de moi. Les noisetiers cessèrent leur bavardage alors que je passais. Les vergerettes rirent doucement. Les achillées me regardèrent avec douceur.


J’arrivai bientôt près d’une ferme. Un gros chien Saint-Bernard me jeta à peine un coup d’œil et entra dans la maison à travers le rideau de chaînes métalliques en maugréant :

« Les promeneurs du dimanche sont vraiment des ploucs ». Trois énormes tournesols devant la ferme me regardèrent passer sans mot dire. Un bel arbre mort au milieu d’un pré d’herbe verte prit un air dubitatif.


J’arrivai finalement à ma voiture, j’ouvris le coffre et je me rendis compte que j’avais mis mes vieilles chaussures de marche, celles qui sont un peu serrées. Dans le coffre, mes moins vieilles chaussures de marche, courroucées, me dirent :

« Pourquoi elles et pas nous ? Pourquoi ne nous as-tu pas emmenées à l’aventure, voir la rivière, marcher sur les feuilles mortes ? »

« Oh pardon, je me suis trompée. La prochaine fois, je vous emmène. »


Je rentrai alors sous la pluie en écoutant "Quando" d'Andrea Laszlo De Simone.


"È colpa del respiro

Fragile

Come me

Se soffro tanto ma son vivo"

 
 

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